Le Maréchal Soult
Cest notre Maréchal
Il sappelait Jean de Dieu Soult. Alors âgé de 16 ans, ce jeune Saint-Amantais sest enrôlé volontairement pour un régiment du roi en 1785. Pourquoi a-t-il fait cela ? Pour gagner quelques écus que lui remis ce jour le capitaine recruteur afin de les donner à sa mère, pour quelle puisse lever loppression des garnisaires. Ceux-ci, envahissant sa rue, ne partiraient quune fois limpôt acquitté. Il ne savait pas, à ce moment-là, quil venait deffectuer le geste le plus important de sa vie ; surtout que les carrières militaires noffraient aucune perceptive à de grandes ambitions. Cétait sans compter sur les bouleversements politiques, qui permirent à des jeunes roturiers emplis de bravoure et de discernement, de grimper peu à peu les échelons du pouvoir jusquà des sommets queux-mêmes nauraient jamais pu imaginer atteindre.
A Saint-Amans Soult, aujourdhui, comment pourrait-on dire ? Oui, cest ça, en fait, aujourdhui, le Maréchal Soult fait parti des meubles. Il est là tout simplement. Il est là sur la place de lEglise, couché dans son tombeau, il est là sur la pancarte de lentrée du village, il est là dans le cSur de tous, car depuis le plus jeune âge, chaque enfant saint-amantais, quil soit de Soult ou de Valtoret, a grandi avec lui. Combien ont rêvé devant la belle demeure du Château Soult-Berg ? Combien se sont amusé dans le parc magnifique qui lentoure? Quon le veuille ou non, il est bien là et pour longtemps.
Son père, Jean Soult, ayant reçu lui-même le même prénom que son père, épousa en 1765 Marie-Brigitte de Grenier de La Pierre, issue dune famille de gentilshommes verriers. En 1772, Jean Soult hérita de loffice de notaire de Saint-Amans Labastide (ancien nom de Saint-Amans Soult).
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Tombeau du Maréchal Soult
Saint-Amans SoultCest là que naquirent les enfants du couple, dont Jean de Dieu Soult en 1769. Sa sSur Joséphine mourut à lâge de 2 ans, son frère Antoine à lâge de 18 ans, sa sSur aînée Marie-Jeanne mourut à 40 ans laissant 3 enfants en bas âge, dont léducation revint à Jean de Dieu Soult.
On laffubla du prénom de Nicolas. Cet ajout vient principalement des aveux du général Thiébault qui dans ses mémoires répandit cette fausseté pour appuyer les succès, quil jugeait immérités, du Maréchal Soult, surtout concernant la campagne de Portugal. Les extraits de lacte de baptême sont sans équivoque, il sappelait bien Jean de Dieu Soult.
Ses premières années vont avoir donc pour cadre le vallon de Saint-Amans, baigné par le Thoré, entouré de ses montagnes que Jean de Dieu affectionnait tant. Les habitants ne sont pas riches, la pauvreté du sol, lisolement du bourg ne permettent pas une vie prospère, quand ce nest pas, les années de mauvaises récoltes, carrément la gêne. A la mort de son père, cest sa mère qui éleva toute la maisonnée, elle fut aidée par son beau-frère Joseph. Ce dernier, chapelain à Saint-Amans, soccupa tout particulièrement de Jean de Dieu, lui inculquant notamment des notions de latin. Peu intéressé par lécriture et la vie sédentaire quobligeaient les études, cest là quil senfuit un beau matin, à la surprise de tout le monde, sengager dans une carrière militaire, qui allait changer la face de son village et celle de la France par la même occasion. Certains disent quil revint, mais devant léchec de cette tentative, il résolut définitivement de sengager et intégra « le Royal-Infanterie ».
Une montée fulgurante
Il montra plus denthousiasme pour la carrière militaire quil ne lavait démontré dans les connotations latines. Il gravit les premiers échelons avec une rapidité phénoménale. Le 31 mars 1791, il est promu caporal, puis caporal fourrier et enfin obtint le grade de sergent. Il fut nommé sous-lieutenant le 31 janvier 1792, alors quil était envoyé comme officier instructeur au premier bataillon de volontaires du Haut-Rhin, commandé par le colonel Salomon, ancien capitaine du régiment de Diesbach-Suisse. En 1793, il fut nommé capitaine et participa aux opérations de larmée du Rhin dans la région de Wissembourg. Cest grâce à une insuffisance dEtat-Major, quil remplit cette fonction et fut chargé de la division Taponier. En 1794, il est nommé adjudant-général chef de bataillon. A cette époque, voilà comment lon voyait le Futur Maréchal : 1,78 mètre environ, une santé robuste, une vue longue, nulle infirmité, talent et moralité, sait lire, écrire et compter, connaît la géographie et les manSuvres dinfanterie au point de pouvoir les enseigner, a de bonnes mSurs. Si ce nest pas un beau profil !
Il est loin de Saint-Amans. Loffice de notaire est devenu la propriété de maître Gayzard. Pierre-Benoît son frère, lavait rejoint et devint son aide camp, Jean-François, le plus jeune, engagé dans la marine marchande, le rejoindra aussi 9 ans plus tard en Italie.
Lascension suprême
Le colonel Soult fut promu Général le 11 octobre 1794, il avait 25 ans. Jean de Dieu ne sarrêtera pas là, il devient Maréchal en 1804 et un an plus tard, prenait la tête du 4ème corps de la Grande Armée, il fut le manSuvrier du centre de la Bataille dAusterlitz qui amena la victoire le 2 décembre 1805. Ses faits darmes ne sarrêteront plus, Batailles dEylau et dHeilsberg (1807), Bataille de Bautzen (1813), Bataille de Toulouse (1814). Distingué Duc de Dalmatie, il obtiendra de nombreuses Grand-Croix. Il finira sa vie dans une carrière politique, Ministre de la Guerre en 1815, puis en 1830, Premier Ministre de 1832 à 1847 et à nouveau Ministre de la Guerre jusquen 1845.
Durant toute sa vie militaire et politique, le Maréchal reçu lappui incessant de son épouse Louise Berg. Cest durant un séjour à Solingen en Allemagne, alors quil était logé par Mme Berg mère, quil rencontra celle qui devait devenir sa femme. Il dira : « le 26 avril 1796, Mme Berg maccordait la main de sa fille et elle fondait un bonheur qui na fait quaugmenter avec les années »
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Au château Soult-Berg, elle était la patronne, tout passait par la Maréchale. Cest sans doute en rapport avec toutes ses années où elle a mené seule cette grande demeure. Sa chambre et celle du Maréchal se trouvent au rez-de-chaussée, tout près du petit salon grisaille, de la bibliothèque et de la salle à manger, donnant sur le parc intérieur où sont encore présents des arbres aux essences rares (tulipiers de Virginie), très prisés par le Maréchal. Au premier étage, se trouvent une dizaine de chambres, dont certaines sont très vétustes. Le petit théâtre, dessiné par le même architecte que celui du roi, est un magnifique écrin aux bancs en arc de cercle rouge opéra, en réhabilitation.
Il est saisissant de penser que dans les années 40, Des blindés SS ont envahi la propriété, ceux-là même qui se dirigeront quelques semaines après sur Oradour-sur-Glane pour y perpétrer ce que lhistoire gardera comme la plus terrible représaille humaine de la seconde guerre mondiale en France.
Aujourdhui, le château Soult-Berg, situé à la sortie de Saint-Amans Soult, route de Béziers, ouvre ses portes aux visiteurs et amateurs de monuments historiques.
Deux frères, issus de la 7ème génération, tentent de réhabiliter ce patrimoine familial. Dimportants travaux ont débuté. Près de 300 visiteurs sy sont rendus pour les journées du patrimoine. Le château est ouvert pendant la belle saison avec des visites guidées.
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Marie-Chantal Guilmin (texte et photos)
(Renseignements historiques tirés du livre « Le MaréchalSoult » de Nicole Gotteri (archiviste-paléographe) (Edition Bernard Giovanangeli - actuellement indisponible)